Publié le 7 octobre 2023
L’habitude s’est prise de réserver le terme de « sacerdoce » (du latin « sacer », sacré), aux prêtres qui ont reçu l’ordination. Mais dans le Nouveau Testament, le mot ne qualifie pas du tout les prêtres, mais les baptisés, qui sont « un sacerdoce royal ». Ceux-ci reçoivent ce qu’on appelle le « sacerdoce commun des fidèles », tandis que, par leur ordination sacerdotale, instaurée vers l’an 250 après. J.C., les prêtres reçoivent le « sacerdoce ministériel ».
Pour Jean Paul II, ces deux sacerdoces sont de « nature » différente. En 1988, dans son exhortation apostolique sur la vocation et la mission des laïcs, il écrivait que ce ministère ordonné, c’est-à-dire celui qui dérive du sacrement de l’ordre, (ordination), confie à ceux qui le reçoivent le mandat de former et de diriger le peuple sacerdotal, car ils sont les successeurs des apôtres.
Avec une certaine insistance, il rappelait que ces ministères « sont la réalisation d’une participation au sacerdoce du Christ, différente, par sa nature et non simplement par son degré, de la participation donnée par le baptême et par la confirmation à tous les fidèles ». « Voilà pourquoi, en vue d’assurer et de faire grandir la communion dans l’Eglise, en particulier en ce qui regarde les ministères divers et complémentaires, les pasteurs doivent avoir la conviction la plus ferme que leur ministère est ordonné au service de tout le peuple de Dieu (cf. Hb 5, 1), et les fidèles laïcs, à leur tour, doivent reconnaître que le sacerdoce ministériel est absolument nécessaire pour leur vie dans l’Eglise et pour leur participation à sa mission », concluait-il. Jean Paul réaffirmait alors l’impossibilité d’ordonner des femmes prêtres.
En revanche, lorsqu’il est interrogé en septembre dernier par six cardinaux conservateurs sur cette même question de l’ordination des femmes, le pape François est plus nuancé :
Rappelant que, selon le concile Vatican II (Lumen Gentium) « le sacerdoce commun des fidèles et le sacerdoce ministériel ont entre eux une différence essentielle », il ajoute qu’il n’est « pas opportun de défendre une différence de degré qui implique de considérer le sacerdoce commun des fidèles comme quelque chose de second ordre ou de moindre valeur, un « degré inférieur. » Il n’est plus question de « nature » différente, mais de « degré ». Et même, le pape cherche à minimiser la portée du terme. Pour lui, si la fonction sacerdotale est « hiérarchique » -puisque l’institution ecclésiale est hiérarchique-, elle ne doit pas être comprise comme une forme de domination mais comme « totalement ordonnée à la sainteté des membres du Christ. »
Sa position prolonge le travail de Benoit XVI qui, en 2009, avait précisé que le diaconat permanent était d’une qualification théologique différente de celle de la prêtrise. Ce faisant Benoît avait écarté un obstacle potentiel au diaconat féminin.
Cette différence de langage entre « nature » et « degré » est, à double titre, instructive. D’une part, elle révèle la volonté du pape d’assurer un soubassement théologique à une éventuelle relève laïque au système clérical, d’autre part, elle montre comment Rome intègre dans son vocabulaire des glissements dans les mots qui permettent de changer… sans dire que l’on change.
EA et AS
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