Publié le 26 février 2025
Les femmes catholiques en grève pendant le Carême pour dénoncer les inégalités
Cette année, un mouvement inédit voit le jour : les femmes catholiques engagées dans leur paroisse font grève. Leur objectif ? Dénoncer les inégalités femmes-hommes persistantes au sein de l’Église catholique.
Ce mouvement intitulé “Catholic Women Strike” a été initié par l’association américaine Women’s Ordination Conference et est suivi par des associations du monde entier, dont en France le Comité de la Jupe, association féministe catholique.
Le carême, du 5 mars au 19 avril 2025, est pour les catholiques un temps de jeûne, de prière et d’aumône, afin d’entrer plus profondément en relation avec Dieu. Cette année, les femmes jeûnent du sexisme et du patriarcat, afin de connaître plus profondément le Dieu qui a créé tous les êtres humains à son image.
Le travail invisible des femmes dans l’Église
En France, les paroisses fonctionnent en grande partie grâce au travail bénévole des femmes. Elles assurent l’éducation religieuse (catéchèse), animent et préparent les célébrations, prennent en charge l’entretien des églises et participent à la préparation des funérailles. Sans leur engagement, de nombreuses paroisses peineraient à survivre.
Malgré ce rôle central, les femmes sont écartées des prises de décision à tous les niveaux de l’institution catholique, Seul le curé est décisionnaire en sa paroisse et l’évêque en son diocèse : le pouvoir est toujours associé à la fonction de prêtre et donc à la masculinité. Cette discrimination affaiblit l’Église et menace son unité. En 2022, la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (CIASE) a d’ailleurs recommandé de renforcer la présence des femmes dans les sphères décisionnelles, à la suite de son rapport sur les violences sexuelles dans l’Église.
Un appel à la grève pour la reconnaissance des femmes dans l’Église
Fatiguées d’être les « grandes oubliées » de l’institution, les femmes catholiques lancent un appel à la grève de leur service bénévole en paroisse. En se retirant temporairement, elles espèrent que leur contribution essentielle sera enfin reconnue. Leur objectif est de souligner l’importance de leur rôle et de provoquer un changement dans les pratiques de l’Église catholique.
Depuis des décennies, les mêmes excuses éculées continuent de tenir les femmes à l’écart des ministères ordonnés (« Pas mûr », « Une plus grande maturation est nécessaire » …) alors que les commissions et les groupes d’étude au Vatican se succèdent sans résultats tangibles. Cette grève symbolique s’adresse aux catholiques qui souhaitent manifester leur déception, leur colère et leur lassitude devant cette lenteur. C’est un appel à l’action : les femmes catholiques n’attendent plus que les hommes ordonnés décident du moment propice pour réformer l’Église.
Comment participer ?
Bien que « faire grève » puisse avoir des signification très différentes pour chacun.e, votre solidarité peut passer par :
- remettre le statu quo en question par le biais de conversations courageuses ;
- mettre en place des signes visibles de soutien à la grève ;
- refuser le travail ou le soutien financier ;
- vous engager dans d’autres activités créatives de résistance ou de témoignage ;
- prier pour soutenir une Église renouvelée qui reconnaît la coresponsabilité et l’égale dignité des femmes.
Il s’agit d’un mouvement mondial, à travers lequel nous demandons à tous les catholiques de réfléchir à la manière dont ils pourraient contribuer à aider l’Église à mieux reconnaître et valoriser les dons et les ministères des femmes.
Voici quelques idées :
- Changez la manière dont vous participez (ou pas) à la messe.
○ Refusez les occasions d’être lecteur, acolyte, ministre eucharistique, catéchiste, membre de la chorale, ou tout autre rôle bénévole que vous pourriez normalement assumer.
○ Si vous décidez quand même d’assister à la messe, portez un signe visible de soutien à la grève et asseyez-vous avec d’autres femmes ou allié.e.s
○ Trouvez une alternative pour que les bancs de votre église soient vides. Par exemple, participez en ligne, ou trouvez une liturgie inclusive.
- Réorientez vos ressources financières.
○ Ne faites pas de dons à l’église institutionnelle pendant le carême. Vous pouvez réorienter ces fonds vers des organisations pour la justice et l’égalité femmes/hommes, la campagne des femmes catholiques en grève, ou vous engager dans l’entraide. Profitez-en pour informer le diocèse de ce que vous faites, soit en mettant un mot dans le panier de la quête, soit dans une lettre.
- Changez la manière dont vous vous présentez (ou ne vous présentez pas) à votre travail diocésain.
○ Une grève durable de 40 jours n’est peut-être pas possible pour de nombreuses femmes qui travaillent, mais réfléchissez à des solutions de rechange ayant un impact. Par exemple, vous pourriez prendre le temps de parler d’égalité femmes-hommes avec des collègues susceptibles d’être intéressées par cette grève.
- Changez votre façon de faire du bénévolat
○ De nombreuses femmes sont impliquées dans des ministères de bénévolat ou de justice sociale dans leurs paroisses. Réfléchissez à la manière dont vous pourriez suspendre votre temps de bénévolat et trouver d’autres personnes qui pourraient vous remplacer. C’est une excellente occasion d’avoir une discussion avec votre communauté sur les raisons de votre participation à la grève.
…Et quelques autres idées :
- Utiliser les réseaux sociaux
○ Nous avons un outil puissant pour communiquer nos valeurs en affichant et en partageant les ressources de Catholic Women Strike sur les réseaux. Faites savoir aux gens pourquoi c’est important pour vous. Utilisez le hashtag #CatholicWomenStrike pour accompagner vos messages. Retrouvez nos ressources pour les réseaux sociaux ici .
- Écrire une lettre
○ Tout au long du Carême, nous recueillerons et partagerons des lettres de femmes qui s’engagent dans la campagne de grève. Nous vous invitons à les partager avec nous. Vous pouvez également écrire une lettre à votre évêque ou aux responsables de l’église autour de chez vous, au journal diocésain ou local ou à de plus grands médias catholiques. Vous faites partie d’une campagne mondiale – faites-le savoir !
- Portez ou publiez un symbole de la grève
○ Peut-être qu’aucun des éléments ci-dessus n’est envisageable pour vous. Vous pourriez peut-être porter un badge ou un pin’s pour signifier votre soutien ? Peut-être pouvez-vous déposer quelques cartes postales ou autocollants dans des endroits stratégiques pour aider à faire passer le message ?
FAQ
« Une grève ne risque-t-elle pas de faire plus de mal que de bien ? Qu’en est-il des enfants de l’enseignement religieux et de tous les autres qui ne recevront pas les ministères dont ils dépendent ? »
Nous devons montrer à nos enfants que nous ne tolérerons pas une Église qui discrimine les femmes. Une grève traduit nos engagements en action prophétique. C’est un ministère de justice que nous entreprenons pour tous les membres de notre Église.
« Et si je risquais mon emploi en faisant grève ?
Une grève efficace n’est pas un effort individuel. Les travailleurs s’unissent pour démontrer leur pouvoir collectif. Les individus peuvent être remplacés, mais une classe entière ne peut l’être. Si les femmes catholiques sont solidaires les unes des autres, nous pouvons inciter les institutions à écouter et à agir.
« Et si ma communauté et moi-même ne sommes pas en mesure de faire grève ?
La beauté des actions de terrain est qu’elles naissent des communautés locales, en s’appuyant sur leurs capacités et leurs ressources. C’est vous qui comprenez le mieux votre communauté, alors si vous souhaitez organiser un autre type de témoignage en solidarité avec l’effort, nous soutenons votre participation et votre créativité dans ce mouvement.
« Comment vais-je remplir mes obligations sacramentelles pendant le carême ?
Envisagez de suivre la messe en direct depuis chez vous ou de rechercher des liturgies alternatives et inclusives animées par des femmes.
Que faire si je ne suis pas à l’aise avec le mot « grève » ?
Le mot « grève » peut être considéré comme chargé et peut-être trop politique pour certaines personnes. Nous utilisons ce mot comme un raccourci pour perturber un système qui ne fonctionne pas et pour permettre aux femmes de reconnaître la valeur de leur présence, de leur travail et de leurs dons. Une « grève » est ce qui attirera l’attention, mais ensemble, nous pouvons toutes y ajouter notre propre expression et notre propre signification.
Revue de presse
Plus de 30 médias ont relayé notre action, vous pouvez consulter la revue de presse complète ici.